Archives mensuelles : octobre 2012

Jonathan Richman

J’ai découvert Jonathan Richman au détour d’une chanson étonnante passée sur FIP, « I was dancing in a lesbian bar » , et j’ai immédiatement eu le coup de foudre pour cet artiste. Difficile de faire autrement en même temps, je vous laisse juge :

Jonathan chante comme s’il avait dix ans, joue de la guitare comme s’il était Django Reinhardt et danse comme moi quand j’ai trop bu. Il émane de lui une joie de vivre contagieuse. Il me fait penser à Flight of the Conchords, à Boby Lapointe et aux Frères Jacques, tous ces artistes qui aiment la musique, la langue et préfèrent faire rire que pleurer (ce qui est une entreprise bien plus difficile de mon point de vue).

En faisant quelques recherches, c’est-à-dire en tapant « Jonathan Richman » dans Google, j’ai appris qu’en plus d’être mignon comme un coeur, il avait fait partie d’un groupe précurseur du mouvement punk, les Modern Lovers. Et en tapant « Modern Lovers » dans YouTube, j’ai découvert une des meilleures chansons jamais écrites, « I’m straight » (ce qui ne signifie pas « Je suis hétéro » , mais plutôt « Je ne suis pas foncedé » ) :

Je veux dire. Quand même. Cette chanson. Elle ne vous hypnotise pas ? Vous n’avez pas envie de prendre la place de hippie Johnny vous aussi ?

Jonathan est un romantique comme je les aime. Il trouve que sa femme n’est jamais aussi belle que quand elle porte des « plain old everyday clothes » , des vêtements de tous les jours :

Sans oublier qu’il a truc pour les vampires de sexe féminin :

A-t-on jamais écrit de plus belles rimes que « Does she cook beans? Does she cook rice? Does she do ritual sacrifice? » (Est-ce qu’elle faire cuire des haricots, du riz ou qu’elle participe à des sacrifices rituels ?)

J’aurais bien aimé le découvrir dans les années 90. Ce gars aurait probablement changé ma vie.


Beauty and the geek

Je ne suis plus vraiment ce qui se passe dans la vie tumultueuse de nos stars préférées, mais j’ai appris ce matin par hasard que Jason Segel et Michelle Williams étaient ensemble. Pour ceux qui ne les connaissent pas, sachez seulement que Michelle Williams est une très jolie actrice et que Jason Segel est un acteur enrobé, pas moche, mais pas vraiment beau non plus, qui n’est disons pas doté d’un charisme à faire chavirer les coeurs. Bref, il est ordinaire. Je suis sûre qu’il a plein de qualités, que c’est un homme drôle, charmant, intelligent, mais le fait est qu’il est assez quelconque physiquement, alors que Michelle Williams correspond parfaitement aux critères de beauté de la société actuelle : elle est mince, blonde et elle fait beaucoup d’efforts pour être à la mode, efforts dont Jason Segel semble être dispensé.

Bon, je me  fous un peu de qui Michelle Williams peut bien tomber amoureuse, mais cette nouvelle m’a fait penser à tous ces films où Jason Segel sort avec de très belles actrices : Kristen Bell et Mila Kunis dans Forgetting Sarah Marshall, Cameron Diaz dans Bad Teacher, Emily Blunt dans The Five-Year Engagement.

Personne ne peut dire qu’ils jouent dans la même ligue.

Y’a pas à dire, on est bien dans une société où la beauté est définie par les hommes : au cinéma, à la télévision, un type quelconque, enrobé, mal fagoté, aura toujours la possibilité de partager l’écran et le lit de filles sublimes, tout le monde trouve ça normal. Et je n’aurais aucun problème avec ça s’il y avait l’équivalent pour les femmes ordinaires, or, on ne voit jamais d’acteurs super sexy tomber amoureux d’un personnage féminin joué par une actrice quelconque, un peu enrobée et qui s’habille chez Kiabi.

Imaginons une seconde la très populaire série Castle avec des rôles inversés. Dans le rôle de Beckett, un acteur d’un sex-appeal équivalent, un type grand, musclé, toujours bien coiffé et bien habillé. De l’autre, imaginons Castle joué par une actrice qui aurait certes beaucoup de charme, mais 30 kilos de trop et 8 ans de plus que Beckett. J’aime autant vous dire que la série n’aurait pas le succès qu’elle a actuellement. J’adore Nathan Fillion hein, je le trouve génial, sa présence seule suffit à me faire regarder la série, mais ce n’est pas Ryan Gosling non plus, faut pas déconner. Son charme suffit pourtant à en faire un partenaire acceptable pour la magnifique Stana Kanic.

Imaginons la série française Bref avec pour héroïne une fille d’une trentaine d’années enrobée, des cheveux filasse et des fringues démodées. Aurait-elle pu conquérir le coeur d’un bellâtre, l’équivalent de la bombe avec qui le héros emménage dans la série ? Non. Alors oui, je sais, le héros finit par se rendre compte qu’il est amoureux de la fille « normale », mais quand même. Il a réussi à pécho une fille qu’on dirait sortie d’un magazine. Ce qui n’est pas un problème en soi, je me répète : le problème c’est que l’inverse ne se voit jamais à la télé.

Il y a une longue tradition d’actrices sublimes que l’on met en couple fictif avec des acteurs qui n’ont pas grand-chose pour eux. Ça pourrait paraître anodin, mais ça ne l’est pas tant que ça, comme pour beaucoup de clichés et de stéréotypes. La société semble accepter (et encourager) l’idée que les femmes sont moins attachées à l’apparence que les hommes et qu’un homme peut séduire n’importe qui à partir du moment où il est drôle, intelligent, ou riche (ce dernier étant incroyablement insultant envers la gent féminine, mais malheureusement entretenu par toutes les matérialistes et tous les hommes superficiels de ce monde). De l’autre côté, on explique aux femmes que si « elles se laissent aller », elles ne trouveront personne capable de les aimer. Que pour que l’amour dure, il faut rester désirable, c’est-à-dire jeune et mince. Y’aurait pas comme un problème ?


Les joies du déménagement, bis

Il y a les numéros en 08, ces numéros qu’on ne peut pas appeler depuis l’étranger, mais qu’on ne peut pas non plus appeler en France depuis un téléphone anglais. C’est très pratique.

Il y a ces gens qui vous disent qu’ils peuvent vous offrir le service pour lequel vous payez à une date précise, mais qui changent d’avis une semaine plus tard, foutant en l’air tout votre planning qui pourtant, rentrait au millimètre.

Il y a ces gens qui ne peuvent rien faire pour vous parce que vous n’avez pas de justificatif de domicile. Ils sont très nombreux ceux-là, et tout en haut de ma shit list.

Il y a aussi ces formulaires d’inscription qui nécessitent de saisir un numéro de téléphone exclusivement français. Je n’ai jamais eu ce problème en Angleterre, du temps où j’avais mon téléphone français.

Il y a la CPAM, qu’il est impossible de contacter par téléphone depuis l’étranger et impossible de contacter par email. J’ai bien essayé de me créer un compte pour pouvoir y indiquer ma nouvelle adresse, mais pour valider le compte il faut un code qui vous est envoyé… à la dernière adresse enregistrée, sans AUCUNE possibilité d’indiquer une autre adresse. Donc d’ici 10 jours, un postier de Gentilly va être bien emmerdé.

Il y a l’URSAFF, qui me répond quand ça lui chante, toujours un peu à côté de la plaque, et qui me complique encore plus les choses, alors que je suis suffisamment perdue comme ça.

Il y a la multitude de mutuelles complémentaires qui proposent toutes des remboursements différents, mais jamais vraiment ce que je recherche, à des prix qui varient tellement que je me demande s’il y a une méthode de calcul valide derrière tout ça.

Il y a surtout une grande fatigue à la fin de la journée, mais rien qu’un grand verre de vin ne puisse guérir.


Les joies du déménagement

Il faut avoir vécu à l’étranger pour se rendre compte à quel point la France est obsédée par les formulaires, les papiers de toute sorte, les preuves, les attestations, les garanties, les justificatifs de domicile.

C’est bien simple, pour trouver un appartement, j’ai bien cru que Seb et moi allions devoir nous reproduire pour offrir notre premier né à une agence immobilière.

Tout est fastidieux, les demandes de renseignements, les démarches, tout nécessite des pages et des pages de brochures à lire, de formulaires au vocabulaire obscur à remplir et d’emails qui apparemment partent dans le vide… Je sais pourquoi les déménagements sont aussi stressants au fond. Ce n’est pas juste parce qu’il faut faire des cartons ou de jeter des affaires, c’est surtout parce qu’il faut passer des heures à choisir des options sur des répondeurs téléphoniques insupportables et à écouter des gens prendre vos noms, prénoms, adresse, n° de téléphone, date de naissance, code de sécurité, nom de jeune fille de sa mère, avant même de pouvoir expliquer pourquoi on appelle. C’est fatigant. Ça me rappelle cette scène de Cuisine et dépendances dans laquelle le personnage d’Agnès Jaoui essaye de réserver un taxi.

Je râle, mais tout se déroule à peu près bien pour l’instant.

J’essaye de ne pas trop penser au déménagement en lui-même, ni même aux au revoir, et je me concentre sur le positif : un nouvel appartement à arranger, de nouvelles rues à mémoriser, de nouvelles habitudes à prendre. Je me demande si je trouverais la même poudre de curry Madras que j’aime, les huiles d’olive aromatisées dont je me sers pour faire revenir des légumes au wok, le même cheddar que je mets dans mes pâtes… Et où vais-je trouver de la worcestershire sauce ? Où vais-je boire de la bière tiède et sans bulle ? Qui va m’appeler « love »?

Oui je sais, ça fait trop longtemps que je suis partie, je vais sûrement trouver tout ça sans aucun problème. Mais c’est une aventure au fond. J’ai beau avoir vécu 27 ans en France, j’ai l’impression qu’il s’agit maintenant d’un pays étranger. J’ai du mal à écrire des mails en français. Je n’arrive pas à utiliser le « Cordialement » de fin de mail, je trouve que tout ce que je dis en français est ampoulé et vieillot. En anglais, il suffit de dire « Cheers » et hop, emballé c’est pesé ! On ne perd pas son temps à taper « Veuillez recevoir, madame, monsieur, l’expression de cordiales salutations ».

Bon et puis il faut dire ce qui est, j’ai oublié ce que c’est, de vivre en France. La course au bon généraliste, au bon spécialiste, au bon garagiste. En Angleterre, ils sont tous tellement je-m’en-foutistes qu’on est content quand on tombe sur quelqu’un qui fait à peu près son boulot. Ça soulage d’une certaine pression quelque part.

Mais plus les attaches se défont en Angleterre et plus j’ai le coeur gros. Plus exactement, depuis quelques jours, je suis tour à tour triste, irritée, angoissée, impatiente et heureuse. C’est un mélange bizarre qui me fait envier la vie de mes chats encore plus que d’habitude.


Bye bye Brighton

Bon, c’est officiel, Brighton et nous vivons nos derniers jours ensemble. Le mois prochain à cette date, nous serons installés dans notre appartement à Bordeaux. Une autre ville qui commence par B, mais qui n’a pas du tout la même résonnance. Brighton est aussi bohème que Bordeaux est bourgeoise. Le choc va être à la hauteur des différences.

On ne part pas par lassitude, mais parce que Sébastien a l’occasion de concrétiser un projet qui lui tient à coeur depuis longtemps. Il se trouve que ce projet nous conduit à Bordeaux, en France, ce qui nous arrange quand même bien, surtout par rapport à la latitude. Je suis triste de quitter Brighton, mais heureuse de me dire qu’on va enfin avoir des printemps et des étés pendant lesquels le soleil sortira plus de deux heures par semaine.

Bordeaux n’est qu’à 4 heures de voiture de Salers, 3 heures de train de Paris, tout à côté de Toulouse, de la Bretagne et des Pyrénées. On y mange des cannelés et on y boit du vin. Il y a même une équipe de roller derby. Alors oui, je sais que je vais trouver mes marques rapidement, mais ça n’empêche que Brighton va me manquer.

Brighton et ses magasins de toutes les couleurs, ses pubs déjantés, ses restaurants de tous les horizons, cette auto-dérision qui manque beaucoup aux Français, ce goût prononcé pour la bière, le thé noyé dans le sucre et le lait, les saucisses et les beans. Brighton et ses cream teas, ses scones, ses crumpets, les burgers de chez Grubbs, les fish’n’chips, la  banoffee pie, le Pimm’s, les Crabbies, le burger du Yeoman, les oeufs Mange tout, les burritos de La Choza, les cocktails du Gingerpig, le pain du Gingerman, les tapas de Don Carlos.

What life in the UK is about

Brighton et ses foules bruyantes qui ne s’excusent jamais de l’être, ses filles courtement vêtues et ses mecs qui mettent trop d’after-shave.

Brighton et sa mer dans laquelle je ne me suis jamais résolue à me baigner, sa plage de galets, son Pier pour touristes, sa météo imprévisible, son fucking petit wind qui nous oblige toujours à nous couvrir, même quand il fait beau. Ses maisons de hobbit, ses petits bouts de jardin, ses chambres en sous-sol, ses bow-windows. Ses loyers hors de prix…

A sunny day at the beach

Et puis il y a l’école d’équitation dans laquelle j’ai appris à monter et qui m’a permis de faire la connaissance de Richard, mon prof préféré et de Gillian, mon Anglaise préférée, le Brighton Women’s Centre qui m’a énormément donné, les Brighton Rockers bien entendu, qui m’ont aidée à réaliser qu’il n’est jamais trop tard pour se lancer dans une nouvelle aventure, pour peu qu’on s’en donne les moyens. Bon je m’arrête là parce qu’on dirait que j’écris un discours de remerciement aux Oscars.

Mais ce déménagement à Bordeaux, je l’ai voulu, je suis même contente qu’il arrive. J’ai besoin de changer d’air, de bousculer mes habitudes. J’ai envie de rencontrer de nouvelles personnes, de profiter toute l’année de la météo et de la gastronomie du sud de la France. Et j’ai envie de passer à un nouveau chapitre.

Ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas prête de l’oublier, Brighton.


Treme

Lorsque Treme a fait son apparition sur HBO il y a trois ans, je n’avais pas beaucoup aimé son pilote. J’avais beaucoup de préjugés sur la Nouvelle-Orléans, que je voyais comme une ville vendue au tourisme et trop attachée à son passé, je n’avais que peu d’intérêt pour le jazz et pas très envie de me plonger dans cet univers déprimant qui me semblait réservé à un public très restreint.

Quelle erreur.

Alors que la troisième saison vient de commencer, je n’ai qu’une chose à dire : Treme est une grande série dramatique, probablement la meilleure à l’antenne à l’heure actuelle.

L’amour que David Simon et Eric Overmyer portent à la Nouvelle-Orléans est contagieux. Après deux saisons, j’ai dû jeter mes préjugés à la poubelle et je me retrouve aujourd’hui à planifier un voyage à la Nouvelle-Orléans, à acheter des albums de Kermit Ruffins et à cuisiner des gombos. Oui, je suis une fille très influençable.

La série commence trois mois après Katrina, mais cette dernière n’est que très rarement mentionnée. La boue et les débris font partie du paysage et rappellent l’ampleur des dégâts, mais le cœur de Treme, c’est la reconstruction, celle d’une ville que le reste des États-Unis méprise, celle de ses habitants qui n’ont plus rien, celle d’une culture qui semble d’une autre époque. Mais, comme on l’apprend dans ces deux premières saisons, ces trois éléments sont indissociables. On ne peut reconstruire l’un sans remettre les deux autres en l’état. Et si Treme parle de la colère, du découragement et du sentiment d’abandon, elle parle surtout (et heureusement) du bonheur apporté par la musique…

Première raison : la musique

Davis: You tell me all you wanna do is get high, play trumpet and barbecue in New Orleans your whole life?

Kermit: That’ll work.

Il y a plusieurs choses à savoir sur la musique dans Treme : les morceaux de musique sont enregistrés pendant le tournage des scènes. C’est très important, car tout sonne juste, les gestes, les mimiques, les sons, l’émotion. Ensuite, Treme, ce n’est pas que du jazz. C’est un mélange de samba, de soul, de hip-hop et de folk et à moins d’avoir un cœur de pierre, on ne peut y être insensible. Il est impossible de ne pas chanter avec Janette (Kim Dickens) sur « Drink a little poison« , impossible de ne pas avoir envie de danser sur le générique et impossible de ne pas être ému par ces enfants apprenant à jouer dans un orchestre. La force de Treme, c’est de réussir à nous faire aimer cette musique et ce qu’elle représente, la joie comme la tristesse, l’espoir comme la mélancolie, et de nous donner envie de découvrir chaque épisode.

Treme aime ses musiciens, mais ne verse pas dans le romantisme. La vie est rude pour les guitaristes, trombonistes, violonistes et pianistes de la Nouvelle-Orléans, elle demande des sacrifices, mais la musique leur donne autant qu’elle leur prend.

Deuxième raison : la cuisine

La passion de Janette (Kim Dickens) pour la nourriture, son amour presque douloureux pour la Nouvelle-Orléans, les scènes de préparation de plats, les barbecues qui parsèment les rues : la cuisine de la Nouvelle-Orléans est aussi importante que la musique… À vrai dire, l’une ne va pas sans l’autre, car la nourriture, comme la musique, se partage, procure du réconfort et oui, même de l’amour. Elle fait du bien à l’âme, au corps, au lien social. Elle est le ciment de la reconstruction.

Treme fait appel à de vrais chefs pour parler de la gastronomie et ça marche. Même si Éric Ripert ou David Chang ont du mal à jouer leur propre rôle avec naturel, j’ai envie de les embrasser quand je les vois préparer à manger ou que je les entends parler de la Nouvelle-Orléans. Tout simplement parce qu’ils incarnent une passion qui manque cruellement à la télévision aujourd’hui.

Troisième raison : les personnages

L’autre point fort de la série, ce sont ses personnages. Je vous mets au défi de ne pas tomber profondément amoureux d’Annie (Lucia Micarelli, violoniste de son état), une musicienne de rue venue à la Nouvelle-Orléans pour suivre son petit ami. Annie est douée, très douée, mais refuse de voir son talent (un travers très féminin) et vit dans l’ombre de Sonny qui lui en veut beaucoup d’être meilleure que lui. Je peux dire, sans rien révéler, que le voyage d’Annie de petite fille timide à femme qui s’affirme m’a pris aux tripes comme peu de récits l’avaient fait jusque-là à la télévision.

Treme regorge d’ailleurs de personnages féminins forts, à vrai dire, ils sont tous excellemment bien écrits : que ce soit Toni Bernette (Melissa Leo, géniale), LaDonna (Khandi Alexander), Janette, Annie, Desiree, toutes ces femmes ont des personnalités complexes qui sortent de ce qu’on a l’habitude de voir sur nos écrans. Elles travaillent, sont mères, épouses, compagnes, sœurs, mais elles ne se laissent pas décrire par le seul fait d’être des femmes. Elles sont tout ça à la fois et ne perdent jamais de vue ce qu’elles veulent. Ça peut sembler anodin, mais ça ne l’est pas, pas à la télévision en tout cas, où les personnages féminins manquent gravement de subtilité et même de diversité.

Treme explore également les relations familiales avec beaucoup de justesse, en particulier celle d’un père et de son fils, Big Chief (Clarke Peters) et Delmond (Rob Brown).

Bref, tout ça pour dire que ne faites pas comme moi, n’attendez pas trop longtemps pour vous mettre à Treme, vous le regretterez. Laissez-vous gagner par la joie contagieuse du générique et par la passion des propos, vous verrez, c’est plus intéressant que d’aduler des antihéros qui n’évoluent plus depuis 3 saisons (oui Walter White, c’est à toi que je pense).


Une semaine à Paris

J’avais oublié à quel point j’aimais Paris. Partir de la Porte d’Orléans, aller jusqu’à Denfert-Rochereau, le Jardin du Luxembourg, ces quartiers que je connais si bien, et puis remonter la rue Oberkampf et voir tous ces gens sortir des restaurants, avoir l’impression de revenir 10 ans en arrière, quand j’allais boire des coups avec les amis le vendredi soir. Sortir dans la rue le midi et voir des gens en voiture se traiter de tous les noms, acheter un paquet de cigarettes à une buraliste aigrie, se balader dans les stands du marché de Ménilmontant,  prendre le métro jusqu’à Jaurès pour manger Quai de Valmy, attendre désespérément un taxi qui ne vient pas, éviter les merdes de chien sur le trottoir, se faire offrir un café dans un petit restau auvergnat, acheter du vin pour prendre l’apéro avec les voisins, se balader au gré des envies, suffoquer à la station Hôtel de Ville, se moquer des bourgeois de St-Germain qui se ressemblent tous, prendre le bus quand il n’y a pas trop de monde, respirer l’odeur si distincte du métro parisien, ce mélange d’urine et de sous-sol qui ne ressemble à aucun autre, profiter des groupes de musique tzigane à Châtelet, se dire en prenant la ligne 6 qu’on aimerait bien que tout le métro soit aérien, reconnaître les touristes à dix kilomètres à la ronde parce qu’ils portent leur sac devant eux, avoir envie d’aller au théâtre en voyant les affiches dans le métro, se dire qu’on irait bien se balader au Père Lachaise si on avait le temps, savoir que le Sacré-Coeur est là et bien là et que toutes les vagues de touristes du monde ne peuvent rien contre lui, se revoir à 17 ans, nerveuse dans la grande ville, impatiente d’apprendre à la connaître, se revoir à 23 ans, quand on y a finalement débarqué, pleine d’espoir, et se revoir à 27 ans, quand il a fallu lui dire au revoir, le coeur gros.

Manger du canard, boire du bon vin, se lamenter sur le prix du café, baver devant les menus du moindre restaurant, s’ouvrir l’appétit en passant devant une boulangerie, avoir envie de coucous, de tajine, de raki, de pizza, de faux sushis et de brochettes de viande au fromage, rigoler des gens qui font la gueule dans le métro, pour finir par la faire, la gueule – comme tout le monde – donner une pièce à un SDF qui vous a dit bonjour, ignorer celui qui mendie dans le métro, se sentir coupable, croiser de bruyantes Anglaises de sortie, avoir envie de s’excuser pour les regards de dédain que les Parisiens leur jettent dans le métro, se dire que les gens sont plus quand même plus marrants en Angleterre.

Entendre les gens râler contre les trains de banlieue, contre le périph’, contre tous ces cons qui prennent leur voiture/le RER pour aller bosser, contre Delanoë qui tue Paris, entendre au détour d’une conversation le vrai accent titi parisien, celui qui me fait sourire, se dire qu’aucune autre ville ne me rend aussi nostalgique et aussi heureuse d’en être partie à la fois.